mardi 31 janvier 2017

Il y a 30 ans, OURAGAN SUR L'OUEST






Le 15 octobre 1987, la météo avait annoncé une petite dépression qui a touché les côtes bretonnes vers 18 h, plus tard que prévu. Cette dépression fit peu de dégâts. Mais, une plus forte dépression s'est formée le long de son front froid dans le golfe de Gascogne quand l'advection froide venant du nord a atteint les eaux très chaudes pour la saison.

Cette intrusion d'air froid était en conjonction avec un fort courant-jet venant d'ouest et un fort mouvement vertical ascendant qui lui donna une pression centrale de 948 hPa (948 mb).

Elle atteignit Ouessant à minuit avec une pression de 954 hPa (954 mb) à la station météo de Brest, record de la station depuis sa création en 1945. Avec une hausse de 29 Hpa en trois heures à partir de 1 h du matin ! (Lors du Fastnet 1979 le baromètre a perdu 22 millibars en  dix heures dont 10 en 1 h )

Elle se déplaçait relativement plus vite que la première dépression (110 km/h) et traversa la Bretagne de Penmarc'h à Saint-Brieuc. 

En Bretagne, la tempête toucha terre en Cornouaille avec à Quimper des rafales continuelles de 180 km/h avant de se diriger vers le Devon en Angleterre.

Les plus forts vents mesurés furent de 220 km/h à Penmarch et à Granville ! (NDLR: avant que l'anémomêtre ne soit arraché)

Heureusement, cette tempête eut lieu avec un faible coefficient de marée ( 28 ) Les vagues atteignaient 16 m à Ouessant.


Mon témoignage:
 "Venant d'emménager sur les hauteurs du mont Garo à St Suliac (35) dans une robuste maison en granit que surplombait la Rance, j'ai totalement sous-estimé la force du vent.  dans l'après-midi, nous avons du passer la serpillère sur le plancher pour éponger la condensation. 

Avant minuit, impossible de dormir, les courants d'air dans la maison étaient importants. Et pour cause, la robuste porte d'entrée en chène avait une flèche de 1 à 2 cm aussi bien en haut qu'en bas! Je l'ai clouée avec de solides planches. Le mobilier de jardin, une bouteille de gaz volaient au fond du jardin . 

Marine, 5 ans, à l'étage s'est réveillée et nous disait :"maman, mon lit bouge..." 

Le lendemain matin, j'ai été surpris de constater l'amoncèlement d'ardoises dans toutes les rues. Une dizaine de bateaux ont rompu leurs amarres et se sont retrouvés sur la grève... 





"Ce dimanche 6 juillet 1969 tourne à la catastrophe dans tout le Nord-ouest du pays. Alors que la météo avait annoncé un temps calme, une tempête se déclenche par surprise au large de la Bretagne. En quelques minutes, les vents atteignent la force de l'ouragan sur la pointe du Finistère avec des rafales à 157km/h à Penmarch et 156km/h sur l'île de Batz. Cette tempête hors du commun en cette saison ravage ensuite toute la moitié Nord. C'est après le passage de la dépression que les vents se déchaînent. Des centaines de yachts chavirent en Manche alors que des campings sont entièrement dévastés en Bretagne et en Normandie. On compte 30 morts."


Le 6 juillet 1969, j’ai vécu ma première tempête sur un Mousquetaire à Cherbourg. Alors qu’une dépression « ordinaire » d’été était prévue, le vent est passé de force 6 à force 12 en quelques minutes. Son centre passant au dessus de Bréhat, balayant la Bretagne Nord.

Le vent atteignit 85 noeuds à Penmarch et Batz. Je crois me souvenir qu’une dizaine de plaisanciers ont disparu dont une Corvette avec 3 personnes (en baie de Lannion) que nous avions rencontré à Guernesey.

Avec notre escadre de trois Mousquetaires, après avoir navigué entre Aurigny et l’avant port de Cherbourg avec un vent faible sous une pluie continue, nous avons passé la soirée au café de Paris jusque vers 23 h d’où nous sommes sorti sous des trombes d’eau vers les pontons du yacht club ( actuellement port jaja) .

Le pontons menaçant de casser, «  On » nous a intimé l’ordre de partir, les trois Mousquetaires (Cook, Bougainville et Mercator) de l’école de voile de Granville étant amarrés à couple en bout de panne. Le vent était passé au nord, très fort, dans l'axe du chenal,  et l’on circulait à 4 pattes sur les pontons qui menaçaient de se rompre.

Nous sommes partis à sec de toile en faisant des 360° pour se freiner avec une gite probable (vieux souvenirs)  de 50° et avons réussi à capeler un « bout » sur une bouée qui se trouvait juste avant l’écluse et le quai.

Là, pour des raisons qui m’étonnent encore aujourd’hui, notre chef de bord, Jean-Louis,  est parti aider sur le port en laissant les stagiaires seuls à bord.  C’est la première fois où j’ai été amené à prendre des initiatives sur un voilier, en veillant au raguage sur l’étrave qui engageait à chaque vague dans des creux probables de plus de 1 m. Dans la nuit, le vent s’est rapidement calmé.

Un anglais est décédé sur son voilier durant la nuit et le lendemain, les pontons étaient dévastés.

A noter, que 10% des tempêtes atteignent la force 10 et 12 et qu’une tempête de cette vigueur a été enregistrée en juillet 1956.

Le 19 décembre 2010, un coup de vent  violent et imprévu s'est produit à Granville ( récit à la fin ).

Certains d'entre vous comprendrons pourquoi je suis particulièrement vigilant sur les qualités marines des voiliers. Car, une situation du même type peut se produire en 2013.

La différence serait que nous serions prévenu par VHF entre 2 et 4 h avant que la situation soit dramatique. 

Mais que feriez vous si vous êtes à plus de 20 milles d'un abri?
Votre voilier est il capable d'encaisser des vents de 60 à 80 noeuds?







Dimanche 19 décembre 2010 , la matinée est belle. 

Je vais me promener dans la matinée sur la jetée. La mer est belle, le vent faible, 10 nds peut être. 


Devant Donville, après le repas du midi, vers 13 h 30, je remarque que, au large à environ 2 milles, la mer est agitée, cela me rappelle le mistral qui souffle dans le golfe de St Tropez.  A la côte, abrité par la pointe du Roc, la mer est calme. J'en conclu que le  vent souffle fortement de sud. J'en suis surpris.

Je vaque à mes occupations puis, 15 à 20 mn plus tard, jetant de nouveau un coup d'oeil à la fenêtre, j'observe la mer blanche au large. Cela m'intrigue, et  observe le barographe qui s'effondre vertigineusement.  La mer fume.

C'est tout à fait inhabituel. Je décide de me rendre sur la pointe du Roc à Granville.








10 mn plus tard, sur la pointe , abrité du vent par le blockhaus, je prend difficilement quelques photos. J'estime la vitesse du vent à plus de 50 noeuds, établi à l'ouest. Cette fois la mer est formée, comme lors des plus fortes tempêtes que j'ai pu observer ici. 

Ce qui me parait incroyable est que moins d'une heure auparavant, la mer était plate et le vent faible.  Je n'imaginais que la mer pouvait se former aussi rapidement.

Deux chalutiers,le Tibériade et le Coelacanthe  rentrent de leur marée. Arrivé devant le port, le Tibériade repart face à la lame à la rencontre de son homologue du même armement.








30 mn plus tard, le vent mollit et tourne au nord-ouest autour de 20/25 noeuds.

On me rapporte du vent moyen à 60 noeuds avec des pointes à 65. Cela me parait plausible.   


Cela a été confirmé par un observateur (Sandrine Vaissié)  à Chausey qui, dans un article de V&V, parle de 65 nds de vent.


Wikipédia :  
"Des courants-jets locaux existent également.

 Durant l'été boréal, des courants-jets peuvent se former dans les régions tropicales orientales, généralement dans une région où un air sec rencontre un air plus humide dans les hautes latitudes."

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