vendredi 20 avril 2012

Le FASTNET 1979 sur Ossian vu par G.Lezan


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Pour quelques pintes de Guiness

FASTNET 1979


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13 août 1979 : « OSSIAN », half-tonner Hustler 32 de Stephens Jones  a été roulé et démâté lors du Fastnet.







«  Lors des trois premiers jours de course, jusqu’aux iles Scilly, nous avions très bien "marché" dans le petit temps, ce qui explique que nous étions avec les classes III et IV. Au cours de l’après-midi du 13 août  le vent est revenu du sud-ouest, autour de 20 nœuds comme prévu. Depuis le matin, nous passons notre garde-robe en revue : du spi léger au médium, puis génois lourd, inter, N° 1. Nous prenons les dispositions de gros temps, nourriture préparée, vêtements rangés…  






En fin d’après-midi, cela remonte encore, le vent souffle à force 6/7, la mer se forme très rapidement. Le baromètre est à 770 millibars.Vers 21 h, le vent approche force 8 probablement, de sud-ouest mais nous faisons route au près sur la route. Nous faisons route sous foc 3 avec trois ris.  Malgré la fatigue et le foutoir qui règne, l’ambiance à bord reste excellente mais seuls ceux qui ont couru sur un half- tonner peuvent imaginer les conditions de vie. La nuit s’annonce musclée.


Son propriétaire, Patrice Ratzel raconte : 


Half-tonner "Indulgence" devenu "Ossian" puis "Tchaïka", "Temps libre" ...


Dans la nuit noire, nous ne voyons pas grand chose, mais les vagues ressemblent à des murs, leur crête supérieure est verticale, abrupte.


Quand le vent est passé ouest vers 23 h, il est monté d’un cran, l’anémomètre affiche 50 nœuds. , sur chaque crête de vague, nous sommes couchés. Manifestement, il ne nous est plus possible de faire le cap vers le Fastnet. Le moral en prend un coup De temps à autre, nous sommes bousculés jusqu’à 80° par une déferlante.  


Très rapidement, nous ferlons la grand-voile et mettons en fuite seulement sous foc n°3.  Grand largue, nous partons sur chaque vague à des vitesses étonnantes et, en conséquence, décidons de réduire encore la toile, bien que le bateau soit tout à fait contrôlable.


Gilles L …  tant bien que mal, affale le foc n°3, puis envoie le tourmentin. Notre vitesse a sensiblement diminuée, de l’ordre de 7 nœuds, et nous maitrisons la situation sans peine.


Vers une heure du matin, François et Gilles  sont de quart. F.. vient de reprendre la barre après avoir posé des points de sutures sur le front de X qui s’est ouvert sur les vis des contreplaques du pont situées à quelques centimètres de sa tête dans sa couchette. Les quatre autres équipiers essaient de se reposer à l’intérieur.


Est-il besoin de préciser que barrer dans de telles conditions, dans la nuit, avec 50/55 nds de vent, des vagues invisibles dont nous saurons par la suite qu’elles atteignaient 10 à 12 m, n’est pas à la portée du premier venu. Le compas électronique ne fonctionne plus, c’est pourquoi Gilles s’échine à réparer les branchements électriques. 

Je vous laisse  imaginer son plaisir dans de telles conditions mais c’est important car le bateau ne dispose pas d’autres compas de route ! Mais, à peine une demi-heure après avoir envoyé le tourmentin, une vague particulièrement forte soulève notre tableau volumineux, l’étrave s’enfonce et le voilier devenu incontrôlable part au lof juste devant la crête de la déferlante. 

Avant que le bateau ne se redresse, il s’est écoulé un temps qui nous parait d’une longueur infinie mais qui n’a pas du dépasser une minute. Nous sommes les uns sur les autres. Par toutes les rares ouvertures, par la descente entre ouverte, l’eau se précipite.



Aussitôt, le bateau redressé, je me précipite à l’extérieur. Il n’y a plus rien sur le pont. Ni mat, ni chandeliers. Après avoir été bloqué sous l’eau, François, amarré par son harnais est remonté facilement à bord du fait que le pont est proche de la surface car le bateau est rempli d’eau. Il est chanceux car la longe de son harnais est sérieusement entamée.


 A l’intérieur, la cloison avant est enfoncée, de l’huile moteur macule le plafond, le capharnaüm règne. Le niveau de l’eau submerge le moteur et les banquettes.  Dans le noir, la surprise est énorme pour ceux qui tentaient de dormir. Nous pensons être en train de couler.  X..    et Y      ont sorti le canot de survie dans le cockpit et lancés des fusées. Dans un deuxième temps, nous nous organisons et une équipe s’occupe de libérer le mat et la bôme qui frappent contre la coque.   

Nous avons réussi à couper les bouts rapidement avec notre cisaille mais surtout grâce à une hachette. Une autre équipe pompe et vide l’eau avec le seau du bord. Après une heure, nous sommes rassurés par le fait que le niveau de l’eau baisse.Constatant que nous n’avions  pas de voie d’eau, j’ai décidé d’attendre que cela se passe, enfermés à l’intérieur. 

La barre est amarrée et le voilier démâté file vers le sud-est à 4/5 nds, bousculé régulièrement par des vagues de direction différentes.


 Nous avons passé le reste de la nuit en cape sèche, barre amarrée. Le bateau libéré de son gréement, se comportait sainement en bouchonnant. Grâce à nos sous-vêtements Helly-Hansen ou Equinoxe, nous ne souffrons pas trop du froid.

Dans la matinée, le vent à mollit mais surtout, la mer est devenue moins impressionnante, sans doute du fait que l’Irlande, à une trentaine de milles, nous abritait légèrement du vent tourné au nord-ouest.

Fatigués, trempés, notre grasse matinée est interrompue vers midi par des appels à l’extérieur. C’était un canot de sauvetage irlandais qui nous remorquera durant les 30 milles qui nous séparait de Ballycoton.


Après 4 ruptures de notre remorque, nous nous mettons à couple d’un chalutier du Guilvinec dont le patron nous engueule copieusement d’avoir été en mer par un tel temps avant de nous habiller de vêtements secs et de nous cuisiner un lieu d’anthologie.

Comble de malchance, le patron du canot de sauvetage est aussi le patron du pub local !  »


Ecrit par Daniel Bonnefoy d'après les témoignages de Gilles Lezan, François Maquet et Patrice Ratzel











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