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"KARIBARIO II " FASTNET 1979
1 Récit de KARIBARIO Hustler 32
2 Récit de Jacques Caraes sur "Alvena" Contention 32
1 Récit de KARIBARIO Hustler 32
2 Récit de Jacques Caraes sur "Alvena" Contention 32
3 Le récit de l'un des OOD 34 chaviré (english)
4 Le FASTNET du Contessa 32 : Alan Ker (english)
5 Le 6 juillet 1969: Une précédente dépression dramatique sur la Manche OUEST
6 Scan de l'excellent article deV&V de septembre 1980 par Alain Caradec
7 Photos de Sydney / Hobart 1998 : huit disparus
13 août 1979 :
« KARIBARIO », half-tonner Hustler 32 de Stephens Jones a chaviré, sançi, perdu et récupéré ses équipiers passés à l'eau lors du Fastnet.
Son propriétaire, Jan Legallet
raconte : Land’s End au petit matin
dans la calmasse…Le vent se relève doucement du sud-ouest, puis forcit et nous
fonçons à 8 nœuds vers le Fastnet à 100° du vent, cap au 330, un peu sous le
vent de la route. La météo nous annonce du sud-ouest 4 à 5 refusant à l’ouest
puis au nord-ouest.Vers 13 h 30, une survente à 30/40 nœuds nous force à
affaler le spi et à mettre le génois inter à un ris et 2 ris dans la grand
voile.
Le vent reste fort et la météo du Conquet, puis la BBC et France-Inter nous
annoncent une dépression de 1000 millibars, située à 12 h T.U. à 200 milles dans
l’ouest du Fastnet, se déplaçant à 30 nœuds vers l’est en se creusant. Le front
froid doit amener du vent de nord-ouest de force 8 avec rafales. La rapidité du
déplacement nous laisse prévoir le coup de vent vers 21 h jusqu’à, au plus
tard, 1 h ou 2 h du matin.
Par prudence, nous décidons de "monter" au cap 270° pour
nous permettre d’abattre pendant le coup de vent sans nous retrouver trop sous
le vent de la route. Le baromètre baisse depuis 17h. Le ciel est gris, la
visibilité mauvaise, nous voyons deux ou trois bateaux. Chacun de nous
appréhende un peu ce coup de vent car, c’est pour la plupart d’entre nous, le
premier de cette force en mer libre. Loin de tout abri.
Eliane n’est guère en forme et ne veut pas se risquer à
préparer le sauté d’agneau. Raoul est sur sa couchette, guère en forme non
plus. Luc, un peu barbouillé et Jean-René sont
dans le cockpit. Olivier commence à réchauffer la bouffe et je réfléchis à ce
qu’il faut faire. Au bout d’un moment, Olivier ne supporte plus de sentir les
effluves du sauté et va s’allonger. Je termine la cuisine, sert Luc qui se
force à manger avant de relayer Jean-René à la
barre. Je mange à mon tour, fait la vaisselle et range tout ce qui pourrait bouger. Je ferme les manches à air
et vérifie que les tangons sont bien saisis.
C’est idiot, mais j’ai peur et je le dis à Luc qui me
rassure en se forçant à afficher un bel optimisme !
Le vent est établi à 35 nœuds et nous envoyons le Solent
qui nous permettra, en prenant un ris dedans, d’avoir un très petit foc.
Vers 21 h 30, Olivier est à la barre, le vent monte à 40
nœuds, et nous décidons de prendre le ris dans le Solent.
Je vais devant mais
la toile, dès qu’elle est choquée, bat tellement fort que j’ai besoin de l’aide
de Luc pour frapper l’écoute et amurer le foc. En renvoyant le mètre de drisse
molli, la ralingue sort du guide et, très vite, de la totalité de l’étai creux,
nous forçant à affaler totalement le foc.
Nous décidons de ne pas le renvoyer. L’anémomètre fait des
incursions à 45 nœuds, et nous marchons à 7 nœuds de
moyenne sous grand voile à deux ris. La nuit est tombée et le vent s’établit à
45 nœuds.
A 22 h 30, nous décidons
d’affaler la grand voile pour préserver le matériel et ne pas risquer d’avoir
beaucoup de mal à l’étouffer si nous attendons trop.
J’ai d’abord barré au 345° puis
je me suis rendu compte que le bateau étalait parfaitement au 305 ou 310°.
L’allure est tellement tranquille que je me surprends à somnoler à la barre.
Vers minuit et demie, je passe
la barre à Jean-René car je commence à fatiguer. Le train-train se poursuit, le
baromètre continue à baisser, le ciel est clair par intermittence. Le vent
reste à 45 nœuds, mollissant parfois à 40 nœuds très brièvement.
A 1 h 30, la lune s’est
cachée; nous prenons soudainement une déferlante qui remplit le cockpit,
nous douchant totalement tous les trois et emmenant le bateau en dérapage sur
une vingtaine de mètres. Le vent est monté quelques instants auparavant et
l’aiguille de l’anémomètre est souvent à 50 nœuds.
Nous discutons quelques instants
afin de décider quelle attitude adopter : étaler bout à la lame au moteur
ou fuir ?
Pendant cette période, le vent
forcit encore, l’anémomètre reste fréquemment en butée plusieurs minutes à 50
nœuds. La mer se creuse et je guide Jean-René en lui indiquant ce qu’il doit
faire pour négocier chaque vague car il est impossible à ce moment de regarder
derrière et de barrer en même temps.
Nous les prenons, si possible, de trois
quart arrière bâbord amure. Les deux bouées couronnes, à plat sur le tableau
arrière inversé, se lèvent à chaque survente et se collent aux filières
arrière. Celle de tribord est attachée au phoscar dont le poids la rabat quand
le vent est inférieur à 50 nœuds !
Deux ou trois déferlantes
remplissent le cockpit, finissant de nous tremper et de remplir nos bottes. La
première, particulièrement forte, casse l’arceau en alu qui fait office de
balcon arrière et sur lequel sont tendues les filières. Le fardage des deux
bouées, dressées à ce moment-là et la perche IOR qui y est attachée y sont sans
doute pour quelque chose. Ces déferlantes nous emmènent dans des surfs un peu
fous et angoissants dans la nuit.
Nous commençons à en avoir assez
et maudissons cette dépression qui semble avoir ralenti sa progression. Le baromètre, après un bref
palier, a repris sa descente. Je suis très inquiet car, si cela doit forcir au
passage du front froid, ça risque d’être l’enfer, car nous aurons des vagues
croisées assez meurtrières. Cela m’ennuie d’aller aussi vite car nous allons
dans le sens de la progression de la dépression mais la météo donnait une
vitesse de progression tellement rapide que notre vitesse devrait être très
faible par rapport à celle-ci.
Nous poursuivons donc. Je
demande à Luc, vers 3 h, de nous faire
une estime et de nous dire exactement
combien d’eau nous avons à courir devant nous. Nous en avons beaucoup
car nous nous dirigeons à ce moment vers la mer d’Irlande, donc pas
d’inquiétude de ce coté-là.
Nous sommes transis et
souhaitons le lever du jour qui n’en finit pas d’arriver. A 4 h 45, alors que le
lever du jour commence enfin à se lever, une vague plus abrupte et plus haute
que les autres nous emmène dans un surf terrible ( je pense à environ 15 nœuds).
Nous la prenons bien en ligne, sans problème apparent; mais lorsque nous
arrivons dans le bas de la pente, nous enfournons dans le creux et nous voyons
avec stupeur l’avant du bateau disparaître et l’eau venir jusqu’à nous.
Je
m’envole, j’avale de l’eau quelques secondes, je m’envole de nouveau et
atterris dans le cockpit plein d’eau. Un
regard hébété : nous sommes tous les trois là. Un morceau de tube sur le
pont : le mat ? J’entends Jean-René dire « le mat est
debout ». Ce n’était qu’un tangon décroché.
Luc surgit de l’intérieur et
nous le renvoyons immédiatement car il n’a pas mis son harnais. Nous nous
employons d’abord à remettre le bateau en ligne puis essayons de réaliser. Nous
avons sanci, mais le bateau, au lieu de faire la culbute complète, est retombé,
a gité à 80° sur tribord et nous a expédié, Eliane et moi, à l’eau alors que Jean-René
se tenait à plein bras à la bastaque.
Nos harnais étaient crochés sur
le rail de fargue à bâbord et le bateau, en se redressant brutalement, nous a
tirés brutalement vers le haut, nous faisant rentrer dans le domaine de la
balistique (Raoul dixit) en nous ramenant dans le cockpit. Le haut du chandelier de
coin du tableau n’y a pas résisté et les filières sont maintenant très molles.
Sans vitesse et travers aux lames, il est difficile de remettre le bateau en
fuite et, nous avons, pendant 30 secondes, l’impression que le safran est
cassé.
Il est maintenant évident qu’il
faut changer quelque chose à notre allure. On reparle de moteur bout à la lame
et je le fais démarrer par Luc, mais de
nouveau cette attitude me parait impraticable et, après discussion, décidons de
mettre des traînards.
LES TRAINARDS
J’ai hésité longtemps car je me
souvenais d’avoir lu dans des récits de course autour du monde que le meilleur
atout d’un voilier par grosse mer de l’arrière est sa vitesse. D’un autre côté,
Mike Birch, dans un article récent, expliquait que dans la tempête, il mettait
des traînards sur son trimaran Olympia pour éviter de sancir.
Nous appelons Olivier car nous
sommes trop absorbés par la négociation des vagues pour nous lancer dans la
confection des traînards. Je demande d’abord à Raoul et Luc de nous passer
l’ancre du mouillage léger, une Brittany de 8 kg. Ils ont mal compris et
nous passent les 100 m
de ligne de mouillage dans leur sac jaune sans l’ancre. Nous filons le tout de
façon que l’ancre soit tirée par les deux bouts. Chacun d’eux est amarré à un
taquet arrière.
Sur notre demande réitérée, ils
nous font passer l’ancre puis l’aussière et nous filons le tout de façon que
l’ancre soit tirée également par les deux bouts. Le bateau devient plus stable
sur sa route et nous marchons à 5 nœuds de moyenne. Nous surfons encore, mais
nous nous arrêtons avant le bas de la vague. Le bon comportement du bateau et la
vitesse excessive nous poussent à augmenter les traînards.
Nous demandons alors la grosse
ancre, une Brittany de 12 kg,
et Olivier l’installe sur les deux aussières d’amarrage tournées sur les mêmes
taquets.
Nous ralentissons à 3.7 nœuds de
moyenne et prenons beaucoup mieux les vagues. Les déferlantes ne sont pas plus
dangereuses qu’elles l’étaient, ce que je craignais au début.
Le jour s’est levé et je suis
ahuri par l’énormité de la mer. Je ne pensais pas que cela pouvait exister à ce
point là ! J’ai vraiment peur maintenant et je commence à me demander si
nous allons nous en sortir entier. Je pense aussi à nos copains de Granville
engagés sur des Class 5 plus petits ( Beep Beep, Gan) et moins stables que le notre. Je crains
beaucoup pour eux. Je suis maintenant certain qu’aucun Classe 5 ne finira la
course et qu’il y aura des victimes.
Le vent a viré depuis 4 h, très
lentement vers l’ouest et, lorsque je descends vers 8 h prendre le Conquet,
nous faisons du 80 ou 90°. Jean-René est toujours à la barre, Olivier lui
indique les vagues à ma place; Eliane est assise dans le cockpit, elle ne veut
pas rentrer.
Nous sommes transis et saoulés
de vent et de fatigue. Aussi, lorsque je rentre, j’ai l’impression de pénétrer
dans un autre univers, de calme et de chaleur. Pourtant le bateau est un
capharnaüm invraisemblable. Tout ce qui était à l’arrière, peu ou pas amarré, est arrivé à l’avant. Le baromètre enregistreur est hors d’usage, on marche sur
des boites de bière, des conserves, des livres de navigation et de la
vaisselle.
Luc a remis un peu d’ordre mais…lorsque nous avons sanci, il a été
projeté au plafond. Il souffre beaucoup du dos et est retombé sur sa main,
s’écrasant un doigt, ce qui l’empêche d’utiliser sa main droite. Raoul, coincé
dans une couchette supérieure, n’a pas bougé. Dès qu’il fait un effort ou
essaye de manger, il vomit : dans l’évier, sur la cafetière, mon bonnet et
un polar. Depuis qu’il s’est blessé ; Luc est dans le même état.
En attendant la météo avec
confiance, j’essaie de faire un point. L’estime n’est pas facile car la lente
rotation du cap nous a fait changer doucement de cap et faire une moyenne n’est
pas évident. En effet, nous avons d’abord marché avec des traînards, puis moins
vite avec les traînards.
De plus, le compteur journalier,
relevé au début de la fuite s’est arrêté. Mais quand ? Je fais tout de
même une vague estime et je tente un relevé gonio, impossible, la ferrite ne
fonctionne plus ! Un peu de consol et le sondeur confirment
« relativement » mon estime. Nous sommes à 60 milles dans le
nord-ouest de Land’s End et à 90 milles de l’ile Lundy dans l’ouest sud-ouest.
Nous allons en gros vers elle, à l’entrée du canal de Bristol.
La météo arrive enfin et me
consterne : 35 à 45 nœuds de sud-ouest à ouest avec fortes rafales, mer
très forte à grosse et ce, pour toute la journée et la nuit prochaine ! On
ne nous promet une amélioration que le lendemain, et encore, très lente.
Dans
l’état physique et moral ou nous nous trouvons, j’ai très peur de la suite. Je
suis personnellement exténué, Raoul et Luc sont « out », Eliane est
épuisée, Jean-René semble tenir le coup mais il a barré toute la nuit. Seul
Olivier a un peu dormi cette nuit et doit être un peu moins mouillé que nous.
Je ressors et annonce la couleur
à ceux qui sont dehors. Les vagues me paraissent encore plus grosses et
abruptes que lorsque je suis rentré. Sans doute, parce que je me suis déshabitué.
Tout à coup, Jean-René nous annonce qu’il voit une barrière de cailloux devant,
à un mille ! Je ne peux y croire car, je ne peux m’être trompé à ce point
dans mon estime. Et pourtant, une fraction de seconde, dans le haut d’une
vague, je crois aussi les voir, mais les dix minutes suivantes les font
disparaître, ce n’était qu’un effet d’optique du aux vagues déferlantes. Nous
croyons de même voir plusieurs fois des voiliers, mais ce ne sont que des
oiseaux vite masqués par la vague suivante.
Nous discutons un peu et
Jean-René semble croire qu’en prenant les vagues sur l’autre hanche, tribord
amure, nous pourrions faire du 120° et, peut-être, parer Land’s End avant la
nuit. Il descend à la table à carte et constate que c’est injouable. Par contre,
il réussit à faire un point gonio, la ferrite ayant repris vie, et confirme à
peu de chose près l’estime.
J’ai repris la barre lorsqu’il
est descendu et je suis les indications d’Olivier. Une petite déferlante
croisée, venue de je ne sais où, nous bouscule et remplit de nouveau le
cockpit. Jean-René, à la table à carte,
est projeté contre l’échelle en alu léger qui plie beaucoup et cassera peu
après, ce qui ne facilitera pas nos allées et venues !
Soudain, un avion très bas
apparaît suivi d’un petit hélicoptère. J’appelle Jean-René et, après une brève
discussion, nous décidons d’envoyer une fusée si l’un d’eux réapparaît. L’avion
repasse seul quelques minutes plus tard et Jean-René tire une fusée. L’avion,
un bi-réacteur assez gros, vient vers nous vire puis s’éloigne, apparemment
sans nous avoir vus. Il réapparaît au loin, 10 minutes plus tard, semblant
chercher et nous tirons une deuxième fusée. Immédiatement, il vient nous
survoler, vire et s’éloigne.
Nous devons être repérés et
pensons que d’autres voiliers sont dans notre zone. Nous discutons de ce qui
peut arriver maintenant. Je ne pense pas que l’état de la mer nous permette de
gagner un autre bateau et, seul un treuillage par hélicoptère semble faisable,
mais le mat ne posera t-il pas de problème ?
La tranquillité relative dans le
comportement du bateau depuis que nous avons mis les traînards me pousserait
plutôt à rester à bord, mais notre épuisement et la perspective d’une journée
et d’une nuit dans les mêmes conditions avec un atterrissage sans carte
détaillée m’obligent à décider d’accepter l’évacuation si une possibilité
nous est donnée.
Vers 10 h30, Jean-René remonte.
Je donne la barre à Olivier, montre à Jean-René comment lui donner des
indications et descend me changer car je grelotte. Je remets tant bien que mal
les planchers en place et me change. J’ai beaucoup de mal car il y a de l’eau
dans les fonds et je ne peux m’asseoir sous peins de me remouiller, les matelas
sont gorgés d’eau. Au bout de 20 mn, j’ai enfin réussi et je m’accorde une
minute de répit, debout, cramponné aux deux demi-cloisons de table à carte et
de cuisine, avant de remettre mon ciré.
Mal m’en prend car un coup de canon retentit et une douche glacée s’abat
sur moi par les interstices de la descente.
Le bateau démarre sur ce
gigantesque coup de pied dans les fesses et accuse, en surfant, un énorme coup
de gite à bâbord. Tout le contenu des équipets de cuisine vole du coté table à
carte et Luc, sur la couchette tribord, s’envole et atterri sur la couchette
supérieure bâbord où est Raoul qui, heureusement, amortit son arrivée. Nous
venons, je pense, de prendre notre plus grosse déferlante, et de loin !
J’entends Jean-René m’appeler, me
disant : »Viens vite, ta femme
est au jus ! ».La première chose que je vois est une tache jaune
à 100 m derrière le tableau mais ce
n’est que le sac qui contenait ‘aussière du mouillage léger… Je vois Jean-René
se pencher sur le tableau et je le rejoins. Eliane est retenue par son harnais
et se cramponne aux traînards.
A deux nous tirons Eliane le long du tableau
inversé pendant qu’Olivier tente de remettre le bateau en ligne. Alors qu’elle
est presque entièrement dans le cockpit, je réalise que je n’ai ni gilet, ni
harnais et rentre immédiatement. Quelques instants après, Jean-René amène
Eliane que j’aide à descendre. Luc et moi l’aidons à se changer.
Jean-René a vu arriver cette
énorme vague déferlante en disant à Olivier de se cramponner très fort. Ce
dernier n’a pas saisi toute la crainte de cet avertissement et a été projeté à
l’eau. Jean-René a pu agripper la barre d’écoute afin de rester
« encore » dans le bateau. Olivier a pu remonter seul presque
immédiatement sur une embardée qui a mis l’angle du tableau arrière au niveau
de l’eau devant lui ! Mais Eliane, déjà à demi-consciente à cause de la
fatigue et du froid, n’a pu avoir aucun réflexe avant d’être projetée.
L’ambiance de relative sécurité
créée par le comportement du bateau avec ses traînards, les quelques heures
sans casse, l’avion qui vient de disparaître et la peur est revenue, aggravée
par la fatigue.
Il est midi, je décide de me
reposer deux heures pour pouvoir tenir, s’il le faut, la nuit prochaine. Bien
qu’épuisé, je ne peux dormir car le bateau roule beaucoup et le vent et les
vagues font énormément de bruit. Sur deux déferlantes, je me précipite dehors
pour voir si tout le monde est là.
Vers 13 h, Jean-René m’appelle.
Il aperçoit un chalutier qui fait route, bout à la lame. Il pense que l’avion
l’a envoyé à notre recherche. Nous essayons un fumigène. Inefficacité absolue.
Il est invisible à plus de 5 m !
Nous nous décidons à envoyer une
fusée des dernières fusées. Elle ne sera pas vue. Cela ne m’étonne guère car
nous ne voyons le chalutier qu’une fois toutes les deux ou trois minutes pendant
5 secondes, lorsque nous sommes simultanément sur une grande crête, et le vent
abrège la durée de la fusée en l’empêchant de monter !
Vers 14 h, Jean-René nous annonce
que le vent ne dépasse plus 45 nœuds de plus d’une demi-heure et que les lames
ne déferlent plus dangereusement. Le ciel est assez clair, il y a du soleil, le
vent est sud-ouest mais des cirrus laissent supposer une nouvelle dépression.
Le baromètre nous manque cruellement et je me souviens alors que mon vieux
baromètre à aiguille est surement toujours à bord. Je le trouve rapidement et
superpose l’aiguille repère. La mer reste énorme et il n’est pas question
d’accélérer dans le sens des vagues car nous pourrions sancir de nouveau. Nous
envisageons donc, si l’accalmie se confirme, de faire route au 170°, travers au
vagues, vers Land’s End.
A 14 h 30, nous constatons que le
baromètre monte et que le vent ne vient plus qu’occasionnellement à 40 nœuds.
Les déferlantes claquent vers l’arrière de la lame et non plus vers l’avant. Il
faut se décider vite car, si le vent forcit à nouveau, il faudrait que nous
ayons déjà franchi Land’s End, sinon nous nous trouverions trop près de la côte
avec le risque d’être drossés dessus. Nous décidons donc de faire un essai de
route.
Jean-René remonte les traînards
qui se sont emmêlés à un point que la petite Brittany, bien qu’ayant perdu sa
manille, est restée au bout des traînards entortillés. Olivier va gréer le
tourmentin, Le bateau réagit bien et nous faisons route au 170°, en lofant sur
les crêtes les plus inquiétantes, à 4 nœuds. Nous commençons à nous
décontracter, Raoul récupère et décide de monter. Il prend la barre. Jean-René
descend se reposer un peu.
Vers 15 h 30, le vent est de 30 à
35 nœuds, les creux ne dépassent guère 6 à 7 m et il y a très peu de déferlantes. Nous
envoyons la grand voile à trois ris. Il faut d’abord récupérer la drisse, qui
s’est détachée de la têtière pendant la nuit et est entortillée dans les
haubans au niveau des premières barres de flèche. Ce n’est pas très haut mais
la mer reste très mauvaise.
Olivier essaie d’abord en
assurant son harnais autour du mât, mais les prises sont trop glissantes, c’est
trop risqué. Au 2ième essai, nous hissons Olivier sur une drisse accrochée à son harnais et il
réussit à ramener cette fichue drisse. Jean-René déferle puis nous prenons le
troisième ris. Chaque manœuvre est longue et pénible à cause de la mer. C’est
seulement vers 16 h 45 que nous sommes en route à 7 nœuds au 170° !
Le vent continue à mollir et la
mer se calme. Le baromètre montre très vite. La météo, en retard d’une guerre,
nous annonce encore 30 à 35 nœuds alors que nous devrons renvoyer de la toile
après Land’s End. Nous ferons même les derniers milles menant à Newlyn, près de
Penzance, au moteur.
A 5 h 30, le 15 août, le bateau
est à quai et nous pouvons enfin nous décontracter.
Jean-René et Luc rentrent en
France en avion. Nous ne repartirons, Raoul, Olivier, Eliane et moi pour
Granville que le 17 à midi après avoir remis le bateau en ordre et fait un bon
gueuleton.
Nous rentrerons à exactement 7 nœuds de moyenne, plein vent arrière,
174 milles en 24 h 50 mn.
Je vais devant mais
la toile, dès qu’elle est choquée, bat tellement fort que j’ai besoin de l’aide
de Luc pour frapper l’écoute et amurer le foc. En renvoyant le mètre de drisse
molli, la ralingue sort du guide et, très vite, de la totalité de l’étai creux,
nous forçant à affaler totalement le foc.
Nous les prenons, si possible, de trois quart arrière bâbord amure. Les deux bouées couronnes, à plat sur le tableau arrière inversé, se lèvent à chaque survente et se collent aux filières arrière. Celle de tribord est attachée au phoscar dont le poids la rabat quand le vent est inférieur à 50 nœuds !
Je m’envole, j’avale de l’eau quelques secondes, je m’envole de nouveau et atterris dans le cockpit plein d’eau. Un regard hébété : nous sommes tous les trois là. Un morceau de tube sur le pont : le mat ? J’entends Jean-René dire « le mat est debout ». Ce n’était qu’un tangon décroché.
Dans l’état physique et moral ou nous nous trouvons, j’ai très peur de la suite. Je suis personnellement exténué, Raoul et Luc sont « out », Eliane est épuisée, Jean-René semble tenir le coup mais il a barré toute la nuit. Seul Olivier a un peu dormi cette nuit et doit être un peu moins mouillé que nous.
Tout à coup, Jean-René nous annonce qu’il voit une barrière de cailloux devant, à un mille ! Je ne peux y croire car, je ne peux m’être trompé à ce point dans mon estime. Et pourtant, une fraction de seconde, dans le haut d’une vague, je crois aussi les voir, mais les dix minutes suivantes les font disparaître, ce n’était qu’un effet d’optique du aux vagues déferlantes. Nous croyons de même voir plusieurs fois des voiliers, mais ce ne sont que des oiseaux vite masqués par la vague suivante.
Nous rentrerons à exactement 7 nœuds de moyenne, plein vent arrière, 174 milles en 24 h 50 mn.
Karibario devenu Morrina III
Red Rock
Hélisara, Midnight Sun et Condor
Police Car
1. Rapport de la course du Fastnet de 1979 (extraits)
L'après-midi du 13 août, le vent soufflait du sud à 30-40 nds sur la zone de course. Après le
passage du front, il passa à l'ouest et força à 50 nds (Bft 10).
Mardi 14 août : paroxysme de la tempête (Bft 11).
Le nouveau train de vague se superposa sur la houle primitive et produisit des vagues de
près de 10 m :
Si l'on accepte la validité des témoignages attestant Force 11 et davantage, certaines vagues
ont approché les 14 m (43 pieds).” [extrait du rapport, traduit de l'anglais]
Les indications relatives à la hauteur des vagues sont des moyennes.
Les plus hautes vagues
ont probablement atteint deux fois la valeur moyenne, soit 20 m, elles présentaient des
fronts presque verticaux et se déplaçaient à une vitesse de 60 à 75 km/h.
La tragédie était inévitable : 23 bateaux abandonnés, 5 bateaux coulés, 16 membres
d'équipage disparus malgré l'intervention de tous les moyens de sauvetage disponibles.
S'agissant des différent tactiques utilisées pour survivre dans le gros temps, il na pas été
possible d'aboutir à des conclusions probantes.
Ci-dessous quatre réponses (le rapport de course repose sur un questionnement), qui
laissent apparaître l'impuissance des équipages :
- “Deux mauvais KO pendant que nous capeyions. ”
- “Roulé et démâté par une vague exceptionnelle et abrupte. La mer était très
confuse et il était impossible de déterminer l'angle d'approche des vagues.”
- “En dérive durant une demi-heure, puis retournés complètement par une vague
qui nous aurait fait chavirer quel que soit son angle d'approche .”
- “En fuite plusieurs heures devant la mer, puis retournés lorsque nous avons été
pris de côté par une vague qui semblait venir de nulle part.”
[traduit de l'anglais]
D'autres ont rapporté que, à l'apogée de la tempête, il y avait des vagues qui étaient
d'une taille et d'une forme ne permettant pas la mise en œuvre d'une tactique de survie
qui aurait préservé du chavirage ou de sévères dommages les bateaux qui se sont trouvés
sur leur chemin. Les points de vue exprimés dépendent […] du facteur chance qui a
déterminé quel bateau serait attrapé par une vague particulièrement sévère.”
[1979 Fastnet Race Inquiry, S. 36, traduction de l'anglais]
Le récit de Jacques Caraes sur Alvena, un Contention 32
" Nous étions six à
bord d’Alvena, un Contention 32 skippé par Bertrand Cudennec, le patron des
voiles Incidences. Notre 3/4 tonner était basé à Brest. Les Contention étaient
et sont encore des bateaux de course-croisière vraiment bons et costauds.
Comme nous n’étions pas
majeurs, la majorité était alors à 21 ans et le plus âgé à bord n’en avait que
20, nous avions obtenu une dérogation des organisateurs anglais pour pouvoir
participer quand même aux courses du RORC cet été-là.
Durant les briefings avant la course, une dépression avait été
évoquée, mais rien de très méchant et nous sommes partis avec les coups de
canon du Royal Squadron sous une météo parfaite qui nous avait permis de
démancher rapidement. Pendant toute la première nuit, nous avons eu une météo
super.
C’est pendant la deuxième nuit que la dépression nous a
rattrapés avant de se fixer et de se creuser sur place. Elle ne bougeait plus
mais le baromètre, lui, dégringolait à vue d’œil. Avec toute la classe des 30 /
40 pieds, nous nous trouvions alors à une
quarantaine de milles du Fastnet.
Le vent
montait, montait. Avec la nuit, il montait encore. Une nuit noire. Le vent,
lui, passait la barre des 55 - 60 nœuds,
avec des vagues de 10 à 11 mètres. Une houle énorme, avec des crêtes
déferlantes. Une nuit vraiment noire
est tombée. On ne voyait plus rien, même pas l’avant du bateau.
Une déferlante venue d’on ne sait où nous a retournés
complètement. Le voilier a fini par se redresser ; nous avions démâté ! Nous
avons aussitôt commencé à sectionner le gréement pour que le mât ne vienne pas
défoncer la coque.
C’est à ce moment qu’une deuxième déferlante nous a pris pour
nous retourner encore. Notre skipper, Bertrand Cudennec a été éjecté. Son
harnais n’a pas résisté au choc ; à l’époque les mousquetons étaient fixés avec
des nœuds de chaise.
Par chance, j’ai envie
de parler de miracle plutôt, nous avons réussi à récupérer Bertrand. Je ne me
souviens plus trop comment. Un miracle ! En fait, le bateau se remplissait
d’eau, nous n’avions plus beaucoup de franc-bord, donc nous avons pu remonter
notre skipper plus facilement.
L’eau continuait de rentrer dans le bateau, nous avons déclenché
le radeau de survie et avons sauté dedans. Pour éviter qu’il se déchire contre
la coque avec les vagues qui nous secouaient dans tous les sens, nous avons
largué le bout de sécurité.
Dans la nuit noire, plus question de voir le voilier. Au moins deux fois, ensuite, d’autres
déferlantes ont retourné notre bib, nous éjectant à chaque fois à la mer.
Mais nous avions accroché nos harnais à des points fixes dans le radeau, ce qui
nous a permis de remonter dedans à chaque fois. Ça a duré toute la nuit.
À l’aube, un autre ¾ tonner, naviguant sous tourmentin, nous a
aperçus. Ils nous ont lancé des traînards avec des bouées, c’est comme ça que
nous avons pu être remontés sur leur bord. Ils étaient six et nous étions six
rescapés. Douze à bord, mais dans ces cas, on est jamais trop serrés. Nous ne
parlions pas la même langue mais ça n’avait aucune importance. Les premières
minutes de telles rencontres sont assez intenses, croyez-moi !
Le vent s’est calmé un peu plus et surtout, nous étions au
portant maintenant ; cap sur les Scilly, puis sur Falmouth. C’est sur les
quais, en fait, que nous avons appris le reste : le drame, tous ces morts, tous
ces naufrages.
Aujourd’hui, ce ne serait
peut-être pas la même chose. Avec les moyens de communication modernes, nous
aurions sans doute pu être prévenus plus vite et mieux. La météo est une
science qui a fait des progrès mais personne n’est à l’abri d’une tempête d’été
qui se creuse.
Les bateaux aussi ont évolué. Ils peuvent
esquiver plus facilement une telle tempête en regagnant un port plus vite au
portant. Mais tout peut encore arriver, même le pire, même tous ces naufrages,
tous ces morts…" Jacques Caraes
L'après-midi du 13 août, le vent soufflait du sud à 30-40 nds sur la zone de course. Après le
passage du front, il passa à l'ouest et força à 50 nds (Bft 10).
Mardi 14 août : paroxysme de la tempête (Bft 11).
Le nouveau train de vague se superposa sur la houle primitive et produisit des vagues de
près de 10 m :
Les plus hautes vagues
ont probablement atteint deux fois la valeur moyenne, soit 20 m, elles présentaient des
fronts presque verticaux et se déplaçaient à une vitesse de 60 à 75 km/h.
La tragédie était inévitable : 23 bateaux abandonnés, 5 bateaux coulés, 16 membres
d'équipage disparus malgré l'intervention de tous les moyens de sauvetage disponibles.
S'agissant des différent tactiques utilisées pour survivre dans le gros temps, il na pas été
possible d'aboutir à des conclusions probantes.
- “Deux mauvais KO pendant que nous capeyions. ”
- “Roulé et démâté par une vague exceptionnelle et abrupte. La mer était très
confuse et il était impossible de déterminer l'angle d'approche des vagues.”
- “En dérive durant une demi-heure, puis retournés complètement par une vague
qui nous aurait fait chavirer quel que soit son angle d'approche .”
- “En fuite plusieurs heures devant la mer, puis retournés lorsque nous avons été
pris de côté par une vague qui semblait venir de nulle part.”
[traduit de l'anglais]
D'autres ont rapporté que, à l'apogée de la tempête, il y avait des vagues qui étaient
d'une taille et d'une forme ne permettant pas la mise en œuvre d'une tactique de survie
qui aurait préservé du chavirage ou de sévères dommages les bateaux qui se sont trouvés
sur leur chemin. Les points de vue exprimés dépendent […] du facteur chance qui a
déterminé quel bateau serait attrapé par une vague particulièrement sévère.”
[1979 Fastnet Race Inquiry, S. 36, traduction de l'anglais]
Le récit de Jacques Caraes sur Alvena, un Contention 32
" Nous étions six à
bord d’Alvena, un Contention 32 skippé par Bertrand Cudennec, le patron des
voiles Incidences. Notre 3/4 tonner était basé à Brest. Les Contention étaient
et sont encore des bateaux de course-croisière vraiment bons et costauds.
Comme nous n’étions pas
majeurs, la majorité était alors à 21 ans et le plus âgé à bord n’en avait que
20, nous avions obtenu une dérogation des organisateurs anglais pour pouvoir
participer quand même aux courses du RORC cet été-là.
Durant les briefings avant la course, une dépression avait été
évoquée, mais rien de très méchant et nous sommes partis avec les coups de
canon du Royal Squadron sous une météo parfaite qui nous avait permis de
démancher rapidement. Pendant toute la première nuit, nous avons eu une météo
super.
C’est pendant la deuxième nuit que la dépression nous a
rattrapés avant de se fixer et de se creuser sur place. Elle ne bougeait plus
mais le baromètre, lui, dégringolait à vue d’œil. Avec toute la classe des 30 /
40 pieds, nous nous trouvions alors à une
quarantaine de milles du Fastnet.
Le vent
montait, montait. Avec la nuit, il montait encore. Une nuit noire. Le vent,
lui, passait la barre des 55 - 60 nœuds,
avec des vagues de 10 à 11 mètres. Une houle énorme, avec des crêtes
déferlantes. Une nuit vraiment noire
est tombée. On ne voyait plus rien, même pas l’avant du bateau.
Une déferlante venue d’on ne sait où nous a retournés
complètement. Le voilier a fini par se redresser ; nous avions démâté ! Nous
avons aussitôt commencé à sectionner le gréement pour que le mât ne vienne pas
défoncer la coque.
C’est à ce moment qu’une deuxième déferlante nous a pris pour
nous retourner encore. Notre skipper, Bertrand Cudennec a été éjecté. Son
harnais n’a pas résisté au choc ; à l’époque les mousquetons étaient fixés avec
des nœuds de chaise.
Par chance, j’ai envie
de parler de miracle plutôt, nous avons réussi à récupérer Bertrand. Je ne me
souviens plus trop comment. Un miracle ! En fait, le bateau se remplissait
d’eau, nous n’avions plus beaucoup de franc-bord, donc nous avons pu remonter
notre skipper plus facilement.
L’eau continuait de rentrer dans le bateau, nous avons déclenché
le radeau de survie et avons sauté dedans. Pour éviter qu’il se déchire contre
la coque avec les vagues qui nous secouaient dans tous les sens, nous avons
largué le bout de sécurité.
Dans la nuit noire, plus question de voir le voilier. Au moins deux fois, ensuite, d’autres
déferlantes ont retourné notre bib, nous éjectant à chaque fois à la mer.
Mais nous avions accroché nos harnais à des points fixes dans le radeau, ce qui
nous a permis de remonter dedans à chaque fois. Ça a duré toute la nuit.
À l’aube, un autre ¾ tonner, naviguant sous tourmentin, nous a
aperçus. Ils nous ont lancé des traînards avec des bouées, c’est comme ça que
nous avons pu être remontés sur leur bord. Ils étaient six et nous étions six
rescapés. Douze à bord, mais dans ces cas, on est jamais trop serrés. Nous ne
parlions pas la même langue mais ça n’avait aucune importance. Les premières
minutes de telles rencontres sont assez intenses, croyez-moi !
Le vent s’est calmé un peu plus et surtout, nous étions au
portant maintenant ; cap sur les Scilly, puis sur Falmouth. C’est sur les
quais, en fait, que nous avons appris le reste : le drame, tous ces morts, tous
ces naufrages.
Aujourd’hui, ce ne serait
peut-être pas la même chose. Avec les moyens de communication modernes, nous
aurions sans doute pu être prévenus plus vite et mieux. La météo est une
science qui a fait des progrès mais personne n’est à l’abri d’une tempête d’été
qui se creuse.
Les bateaux aussi ont évolué. Ils peuvent
esquiver plus facilement une telle tempête en regagnant un port plus vite au
portant. Mais tout peut encore arriver, même le pire, même tous ces naufrages,
tous ces morts…" Jacques Caraes
Le récit de l'un des OOD 34 chaviré
et sauvé par le SHE 36 "Lorelei"
Stuart Quarrie, then 23, was navigator on board the OOD 34 Griffin. Along with Peter Conway and skipper Neil Graham he was one of three instructors from the National Sailing Centre and was racing with four trainees. The boat was new and belonged to the RORC.
By the time the midnight forecast came through [on 14 August] that said it would be much windier, it was already seriously windy. It wasn’t seriously rough, though – it was still building at that stage. We got the mainsail down and sorted ourselves out with a heavy weather jib. We were still racing, only later did we go into survival mode.
When we did, we decided we would run up the Irish Sea until the storm had blown itself out. The wind and seas built and built very quickly until we started getting some waves coming in from the north-westerly direction that were very hard to handle.
We took the jib off completely. It was in a luff foil and getting that down was a nightmare – three people on the foredeck for what seemed forever. I was steering and the waves now were foaming crests. Most were manageable but the occasional one would come out of leftfield and try to broach us.
I remember absolutely vividly to this day one huge wave that hadn’t broken. There was lots of phosphorescence around that night and this wave was a blackness in the shimmery green of the broken waves. It seemed to come at 90° to the rest of the wavetrain. I tried to turn downwind but we didn’t have enough boatspeed. It hit us nearly abeam.
That’s the last I remember of that wave because I was washed out of the boat. My harness clip opened up – the hook got caught sideways in the D-ring and came undone and I went swimming.
Luckily, I could see the lifebuoy light flashing away and that’s what I swam back to. When I got back to it I found that it was still firmly in its clips on the back of the boat, upside down. If the boat hadn’t turned upside down, I’d have drowned.
Nobody was around. Neil swam out from the air bubble beneath the cockpit. Eventually the boat settled down in the water and another wave came along and it righted itself. But by then the cabin was two-thirds full of water and the cockpit was awash. Neil said the classic “Man the pumps!” so we pumped a few gallons out until another wave came along and dumped another 100 gallons in.
Stuart Quarrie, then 23, was navigator on board the OOD 34 Griffin. Along with Peter Conway and skipper Neil Graham he was one of three instructors from the National Sailing Centre and was racing with four trainees. The boat was new and belonged to the RORC.
By the time the midnight forecast came through [on 14 August] that said it would be much windier, it was already seriously windy. It wasn’t seriously rough, though – it was still building at that stage. We got the mainsail down and sorted ourselves out with a heavy weather jib. We were still racing, only later did we go into survival mode.
When we did, we decided we would run up the Irish Sea until the storm had blown itself out. The wind and seas built and built very quickly until we started getting some waves coming in from the north-westerly direction that were very hard to handle.
We took the jib off completely. It was in a luff foil and getting that down was a nightmare – three people on the foredeck for what seemed forever. I was steering and the waves now were foaming crests. Most were manageable but the occasional one would come out of leftfield and try to broach us.
I remember absolutely vividly to this day one huge wave that hadn’t broken. There was lots of phosphorescence around that night and this wave was a blackness in the shimmery green of the broken waves. It seemed to come at 90° to the rest of the wavetrain. I tried to turn downwind but we didn’t have enough boatspeed. It hit us nearly abeam.
That’s the last I remember of that wave because I was washed out of the boat. My harness clip opened up – the hook got caught sideways in the D-ring and came undone and I went swimming.
Luckily, I could see the lifebuoy light flashing away and that’s what I swam back to. When I got back to it I found that it was still firmly in its clips on the back of the boat, upside down. If the boat hadn’t turned upside down, I’d have drowned.
Nobody was around. Neil swam out from the air bubble beneath the cockpit. Eventually the boat settled down in the water and another wave came along and it righted itself. But by then the cabin was two-thirds full of water and the cockpit was awash. Neil said the classic “Man the pumps!” so we pumped a few gallons out until another wave came along and dumped another 100 gallons in.
The washboards had fallen out during the capsize and gone. The boat was almost awash and sluggishly unstable and we decided that we would have to abandon ship. We know we made the right decision because when we got the liferaft inflated and got in, before we cut the painter and got half a wave away we saw the forehatch pop out with the water pressure and the boat sank.
This had all happened within a couple of hours of the midnight forecast. The scariest thing was how quickly it all developed. From sailing along with the spinnaker to sinking was about four hours.
After we’d got in the liferaft we let off one parachute flare. We streamed the drogue but as it took up the load it pulled off its fastening. So then we were being picked up by the waves and surfing down the wave crests, spinning round totally out of control then ending up at the bottom in a banana shape. It would pop back into a circular shape and the next wave would come along. It was a real mad fairground ride.
image: http://keyassets.timeincuk.net/inspirewp/live/wp-content/uploads/sites/21/2009/10/Griffinpainting_AlanTabor1.jpg
A big wave came and turned the liferaft turned upside down. It all went eerily quiet and calm. Two of the crew had been flicked out through the entrance and we didn’t know where they were. Eventually the liferaft righted itself but there was so much water in the canopy that it came off. The crew who had been clinging on outside got back in. We were sitting up to our armpits in water and one guy had been in jeans and T-shirt quickly got very cold and was semi-conscious. We sat there being seasick and waiting for morning, or dying.
Then we saw Lorelei. [Alain Catherineau and the crew of French yacht Lorelei had seen the flare and altered course]. She came through the same wave trough we were in. Had she been a wave away we wouldn’t have seen each other, so quite apart from their seamanship it was bloody lucky. We fired off the rest of our parachute flares in the space of about 30 seconds.
After four attempts [Catherineau] managed to stop more or less alongside us on the upwind side and threw a whole lot of lines criss-cross over us and we pulled ourselves across and swam on to the sidedeck and were bustled down below. The unconscious guy was pulled on board.
The skipper of Lorelei and his mate were really well organised and within minutes we had the welcoming sight of a kettle being put on and hot cups of tea being made. But we were sitting there, on the eight-man liferaft, now 13 of us on board, thinking ‘This boat is only 2ft longer than ours. What if this all happens again?’
But Lorelei was a very different boat, not nearly as fast downwind but a more inherently stable hull design. The crew retired from the race and turned back, dawn came and the gale had gone – huge leftover seas but not breaking any more. Eventually the crew put on more and more sail and we had a nice sail back to Plymouth.
I went sailing again eight days later and the first time I had anything approaching bad weather I was very nervous. It didn’t put me off, but for years afterwards I had nightmares about that one big wave coming in and grabbing me.
Griffin was never seen again. The Doug Petersen OOD 34 was severely criticised for its stability characteristics. Alain Catherineau was awarded the YJA Yachtsman of the Year trophy that year for his seamanship during the rescue. Stuart Quarrie still sails offshore for pleasure and is now CEO of Cowes Week Ltd.
Read more at http://www.yachtingworld.com/fastnet79/stuart-quarries-story-10510#5RMeQJMW6H584KbB.99
The washboards had fallen out during the capsize and gone. The boat was almost awash and sluggishly unstable and we decided that we would have to abandon ship. We know we made the right decision because when we got the liferaft inflated and got in, before we cut the painter and got half a wave away we saw the forehatch pop out with the water pressure and the boat sank.
This had all happened within a couple of hours of the midnight forecast. The scariest thing was how quickly it all developed. From sailing along with the spinnaker to sinking was about four hours.
After we’d got in the liferaft we let off one parachute flare. We streamed the drogue but as it took up the load it pulled off its fastening. So then we were being picked up by the waves and surfing down the wave crests, spinning round totally out of control then ending up at the bottom in a banana shape. It would pop back into a circular shape and the next wave would come along. It was a real mad fairground ride.
image: http://keyassets.timeincuk.net/inspirewp/live/wp-content/uploads/sites/21/2009/10/Griffinpainting_AlanTabor1.jpg
A big wave came and turned the liferaft turned upside down. It all went eerily quiet and calm. Two of the crew had been flicked out through the entrance and we didn’t know where they were. Eventually the liferaft righted itself but there was so much water in the canopy that it came off. The crew who had been clinging on outside got back in. We were sitting up to our armpits in water and one guy had been in jeans and T-shirt quickly got very cold and was semi-conscious. We sat there being seasick and waiting for morning, or dying.
Then we saw Lorelei. [Alain Catherineau and the crew of French yacht Lorelei had seen the flare and altered course]. She came through the same wave trough we were in. Had she been a wave away we wouldn’t have seen each other, so quite apart from their seamanship it was bloody lucky. We fired off the rest of our parachute flares in the space of about 30 seconds.
After four attempts [Catherineau] managed to stop more or less alongside us on the upwind side and threw a whole lot of lines criss-cross over us and we pulled ourselves across and swam on to the sidedeck and were bustled down below. The unconscious guy was pulled on board.
The skipper of Lorelei and his mate were really well organised and within minutes we had the welcoming sight of a kettle being put on and hot cups of tea being made. But we were sitting there, on the eight-man liferaft, now 13 of us on board, thinking ‘This boat is only 2ft longer than ours. What if this all happens again?’
But Lorelei was a very different boat, not nearly as fast downwind but a more inherently stable hull design. The crew retired from the race and turned back, dawn came and the gale had gone – huge leftover seas but not breaking any more. Eventually the crew put on more and more sail and we had a nice sail back to Plymouth.
I went sailing again eight days later and the first time I had anything approaching bad weather I was very nervous. It didn’t put me off, but for years afterwards I had nightmares about that one big wave coming in and grabbing me.
Griffin was never seen again. The Doug Petersen OOD 34 was severely criticised for its stability characteristics. Alain Catherineau was awarded the YJA Yachtsman of the Year trophy that year for his seamanship during the rescue. Stuart Quarrie still sails offshore for pleasure and is now CEO of Cowes Week Ltd.
Le FASTNET du seul Class 5 qui a terminé la course:
un Contessa 32
Alan Ker, then 23, was skipper of Assent, a Contessa 32 he still owns and sails with his father Willie. He was racing with four friends between 18 and 25, all of whom were experienced offshore sailors.image: http://keyassets.timeincuk.net/inspirewp/live/wp-content/uploads/sites/21/2009/10/Alan_Kerr.jpgWe were prepared for a very rough night but we didn’t have any inkling how rough it was going to be. As we cleared the Scillies the wind was picking up from the west and as the front came through there was heavy rain, until that cleared and it became bright moonlight over an extremely stormy sea.
At that point we were starting to say “Well, that looks like page 49 of Adlard Coles’s Heavy Weather Sailing.’Until the front came through the sea conditions were reasonably OK; they were getting big, but they were regular and they had a good pattern. We gradually slabbed the main down to the smallest size and a small storm jib.
Some time later the storm jib disintegrated and we sailed on under a three-reefed main.At 0200 we started to see other yachts that were not continuing to race and we passed two or three other boats lying ahull or hove to. Once the front went through the seas became extremely confused.
My feeling was there were two intersecting wave systems and it was really difficult to read.At about that time we had a couple of knockdowns. We certainly had one situation when we were beyond horizontal. But we didn’t see it as a major issue.
We were all of the same mind: that it was really, really rough and this was the sort of thing that was going to happen, so when we were knocked down we were kind of expecting it.
There was a certain amount of damage. We lost the hatch off the anchor well forward and we had a lot of gear rolling around in the cabin. I was in my bunk at the time. The two people on deck were secured by chest lines from a spare genoa sheet so when we were knocked down they said it was very interesting but not too much of a problem.
The Contessa 32 has a very extreme stability curve so it can go well below the horizontal and still roll back up the right way, so we never did a complete roll, though I have to say that subsequently my father has.We didn’t consider stopping as an option so we just carried on. I thought maintaining a course towards the Fastnet was the seamanlike thing to do because all the time it was giving us more sea room up the St George’s Channel if we did have to run off or lie ahull.
Any attempt to turn south and run towards Land’s End was going to be problematical.By dawn we had aircraft flying over us and passed a dismasted yacht and stayed with them for about half an hour.
We saw the guardship HMS Scylla when we went back past the Scillies and although we didn’t have a VHF we knew there was a lot going on.We were going as fast as we could in a Contessa and from the Scillies back to Plymouth we averaged over 8 knots which, for a boat like that, was quite good going. We wrecked the spinnaker running in quite a swell when we broached and it all came apart. I wasn’t too popular afterwards – my father wasn’t very happy.It was only when we got to Plymouth we knew how serious the situation had been, and we knew almost immediately.
When we came into Millbay Docks in the dark there wasn’t anybody else about and Fiona Wylie went up to the race office and came straight back and said: “It looks pretty serious. We’re the only finisher [in our class] and there are a lot of casualties.”I think the characteristics of the Contessa 32 played a very large part and subsequently gave my father the confidence to do things which, in another boat, you might have considered unwise.
Where he has been and what he has done worldwide since has been in part because of that.Alan Ker and his crew won their class. In Assent his father, Willie, has circumnavigated Iceland, sailed to Greenland and Baffin Island several times, cruised to the Antarctic and up to Alaska and Russia, returning via the Great Lakes and Labrador. Most of his sailing is single-handed and this summer he is making a solo voyage in Assent to Greenland, Baffin Island and back, aged 85.
Read more at http://www.yachtingworld.com/fastnet79/the-story-of-alan-ker-10520#17hpBHXIjow0wyuH.99
6 juillet 1969: Une précédente dépression dramatique
1998 Sydney / Hobart
huit disparus.
https://youtu.be/1PF9ua8Iqmc
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